03/07/2007

Sept clés pour le plein-emploi en France par Nathalie BIRCHEM

 b1496145368885bcb32bdbcc26f46971.jpgLes défis à relever pour ramener le taux de chômage à 5 % d'ici à 2012, sont analysés, avec l'objectivité des faits,  par la journaliste Nathalie BIRCHEM

lire aussi le rapport SARKOZY BORLOO

 1.Pérenniser une croissance supérieure à 2 %

2.Maîtriser le coût du travail

3. Remplacer les emplois d’hier par les emplois de demain

4 Améliorer la formation

5. Aménager les contrats de travail

6. Mieux accompagner les chômeurs

7. Aménager les fins de carrière

 

 1.Pérenniser une croissance supérieure à 2 %

C’est un peu comme un problème de robinet. Sachant que pour faire baisser le chômage d’un point, il faut grosso modo que 270 000 chômeurs retrouvent un emploi, combien faut-il de créations d’emplois pour ramener le taux de chômage de 8,2 % à 5 % en cinq ans ? Réponse : « 864 000, en théorie, mais au moins 1,4 million en réalité, car il faut tenir compte du fait que la population active va encore augmenter pour des raisons démographiques jusqu’en 2012 et que, comme à chaque période de baisse du chômage, de nouvelles catégories de personnes vont arriver sur le marché du travail, certaines femmes au foyer par exemple », estime Matthieu Lemoine, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).


La croissance suffira-t-elle à créer tous ces emplois ? Peut-être, mais il faudra qu’elle se hisse à un niveau supérieur à son rythme moyen depuis dix ans. Avec une croissance de 2,2 % en 2006, l’économie française a par exemple créé 256 000 emplois. Pour atteindre le plein-emploi, la croissance ne suffira vraisemblablement pas.

2. Maîtriser le coût du travail

Le haut niveau du taux de prélèvements sur le travail en France (42,4 % contre 36,5 % en moyenne pour l’Union européenne à 15) est le reproche le plus entendu concernant notre marché du travail. Pour autant, il ne faut pas se leurrer, prévient Jean-Christophe Caffet, économiste chez Natixis : « Même si on baisse le coût du travail de 5 points, on ne pourra jamais concurrencer les Chinois sur ce terrain. » L’enjeu est plutôt d’éviter de charger encore la barque, alors que les dépenses de santé et de vieillesse, financées par les cotisations sociales, sont amenées à progresser. Il s’agirait donc de transférer une partie des cotisations sociales vers un autre prélèvement, qui ne taxe pas le travail. La TVA, assise sur la consommation, tient la corde, car elle aurait l’avantage de taxer aussi les produits importés. Mais, soulignent les économistes, elle est « antiredistributive » car elle est acquittée de la même façon par tous les ménages, qu’ils soient modestes ou aisés. La CSG, proportionnelle aux revenus, l’est davantage, et l’impôt sur le revenu, dont le taux progresse selon des paliers de revenus, plus encore.

3. Remplacer les emplois d’hier par les emplois de demain

Chaque jour, des milliers d’emplois sont détruits en France, majoritairement dans l’industrie, où les pays émergents présentent des coûts plus compétitifs. Comment lutter contre ce phénomène ? « Il est vain de se battre contre les délocalisations, estime Pierre Boisard, chercheur au CNRS. L’enjeu est plutôt, comme le fait l’Allemagne, de se positionner sur les secteurs où nous pouvons rester compétitifs sur un élément autre que les prix, la haute technologie par exemple. » Or, problème majeur, avec une dépense en recherche et développement en perte de vitesse (2,1 % du PIB en 2004, contre 2,7 % aux États-Unis ou 3,5 % en Finlande), la France ne se donne guère les moyens d’innover. Autre piste : se positionner sur les métiers non délocalisables. C’est par exemple le cas des services à la personne, objet depuis les années 1990 de nombreuses aides publiques, dont le récent plan Borloo de 2005. Mais si ce secteur crée environ 70 000 emplois par an (et même 145 000 en 2006), ces emplois restent majoritairement à temps partiel (15 heures hebdomadaires en moyenne). Beaucoup reste donc à faire pour transformer ces petits boulots en véritables emplois.

4. Améliorer la formation

Chaque année, « entre 100 000 et 150 000 jeunes sortent du système éducatif sans diplôme et à peu près autant avec un diplôme qui ne leur permet pas d’accéder au marché du travail », analyse Jean-Christophe Caffet, chez Natixis. Ce qui explique largement le haut niveau du chômage des moins de 25 ans (21,1 %). Pour l’économiste, la priorité est donc de « rapprocher l’université du monde professionnel, sur le modèle de ce qui se fait dans les écoles d’ingénieurs ou de commerce, où l’insertion professionnelle est bien meilleure ». Indispensable, cette réforme aura cependant un coût, même si elle ne se limite pas à une question de moyens : un élève de grande école coûte environ 14 000 € par an, soit près de deux fois plus qu’un étudiant en université. Dotée d’une formation initiale en perte de vitesse, la France ne se rattrape pas avec la formation continue, pourtant déterminante, puisqu’un salarié est désormais amené à occuper plusieurs emplois dans sa vie. Or, explique Pierre Boisard dans son livre Sortir du chômage (Éd. Mango, avril 2007), « en France, un peu moins de 8 % des salariés ont participé à une formation au cours des dernières semaines, contre 25 % des Finlandais et 35 % des Suédois ». Circonstances aggravantes : souvent trop courtes pour être efficaces, ces formations profitent surtout aux salariés qui en ont le moins besoin, à savoir les plus qualifiés. Il est donc urgent d’améliorer l’efficacité du dispositif, qui coûte près de 20 milliards d’euros par an. 89 % des salariés bénéficient d’un CDI  

5. Aménager les contrats de travail

Actuellement, 89 % des salariés bénéficient d’un CDI. En moyenne, ils restent douze ans en poste. Mais, désormais, 72,2 % des embauches se font en CDD d’une durée de trois mois en moyenne, tandis que 3,5 % prennent la forme d’un contrat d’intérim (quinze jours en moyenne). Or, seuls 35 % des CDD sont transformés en CDI au bout d’un an. D’où une forte inégalité entre les titulaires de CDI, qui peuvent faire des projets, et les autres. Comment rétablir plus d’équité ? Les syndicats privilégient une modulation des cotisations sociales en fonction du type de contrat utilisé, durable ou non. Les employeurs, eux, mettent en avant le fort risque juridique lié à la rupture des CDI, 26 % des motifs de licenciements individuels autres qu’économiques étant contestés aux prud’hommes. Et plaident plutôt pour un assouplissement des motifs de licenciement. Qu’il soit « unique » ou non, le contrat de travail de demain, qui fera l’objet d’une prochaine négociation, devra concilier ces deux exigences.

6. Mieux accompagner les chômeurs

En France, la durée moyenne du chômage est de 16,4 mois contre 12,2 mois pour la moyenne OCDE et 4,8 aux États-Unis. Ainsi, le taux de reclassement des chômeurs est assez faible et il dépend étroitement du degré d’accompagnement personnalisé qui est proposé. Il est d’environ 50 % au bout de huit mois pour les salariés qui ont la chance d’être pris en charge par une convention de reclassement personnalisé ou une cellule de reclassement. « Ce qu’il faut, c’est que chaque demandeur d’emploi soit suivi personnellement par un référent », estime ainsi Jean-Christophe Caffet (Natixis). « Les pays qui obtiennent les meilleurs résultats sont ceux qui mettent des moyens importants sur l’accompagnement au retour à l’emploi », précise Matthieu Lemoine (OFCE). Or, détaille l’économiste, la dépense liée à l’accompagnement de chaque chômeur est 1,6 fois plus faible qu’au Royaume-Uni et 2,7 fois moins élevée qu’en Suède. 7. Aménager les fins de carrière C’est une des tares françaises : 37,6 % des 55-64 ans seulement sont sur le marché du travail, contre 70 % pour les pays les plus performants. La faute aux préretraites, utilisées massivement lors des plans sociaux. Et à la « dispense de recherche d’emploi », consentie aux demandeurs d’emplois de plus de 55 ans et qui concerne désormais 415 000 seniors. Si ces mesures permettent de faire sortir une majorité de seniors des statistiques du chômage, leur épargnant d’affronter un marché de l’emploi très discriminant vis-à-vis de l’âge, elles signent aussi l’échec des politiques récentes (CDD seniors, surcote, cumul emploi-retraite, retraite progressive) destinées à inciter à la prolongation d’activité. Or, a rappelé le Conseil d’orientation des retraites, « cette situation met en péril le potentiel de croissance économique et l’équilibre financier de nos régimes de retraite ».  

Nathalie BIRCHEM La CROIX 28.06.07

07:58 Publié dans La fonction d'avocat | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : borloo, chomage, saf, cosal, birchem |  Facebook | | | Pin it! |  Imprimer | | |

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