CEDH VERSINI/ France : CEDH 16.06.16 de la validité et l’utilisation des écoutes téléphoniques (17/06/2016)

 

cedh3.jpgL’intérêt de cette affaire, en apparence banale, est d’une grande importance pour notre Démocratie compte tenu de l’évolution des procédures d’enquêtes pénales et fiscales  et des méthodes de  recherche de la preuve, évolution déclenchée par nos politiciens dans le cadre du rapport LEGER (cliquer).

Par ailleurs le positionnement du curseur des libertes sur l'équilibre entre secret et intéret général va à nouveau se poser (lire l'intervention de Forni lors du  séminaire de la conférence des batonniers )

 

La CEDH confirme la décision du conseil de l'ordre de paris  qui le 16 décembre 2003,prononça contre le requérant la peine de l’interdiction temporaire d’exercer la profession d’avocat pendant deux ans, assortie d’un sursis de vingt-et-un mois, et, contre la requérante, la peine de l’interdiction temporaire d’exercer la profession d’avocat pendant un an, avec sursis.

 

 

Arret l’affaire Versini-Campinchi et Crasnianski c. France (requête n o 49176/11) 

le communiqué de presse

Arr-t Versini-Campinchi et Crasnianski c. France -
transcription d'un -change téléphonique entre un avocat et son client .pdf

Pas de secret pour l'avocat complice

 

 

                Les questions sont au moins doubles

 

 

Quelles sont les conditions de validité des écoutes d’un avocat ?

Quelles sont les conditions d’utilisation desdites écoutes ?

 

commment introduire valablement une requête?

 

CINQUIÈME SECTION

Requête no 49176/11
Jean-Pierre VERSINI-CAMPINCHI et Tania CRASNIANSKI
contre la France
     introduite le 1er août 2011

Nos confrères  M. Jean-Pierre Versini-Campinchi (le requérant )et Mme Tania Crasnianski (la requérante )ont saisi  la cour européenne des droits de l homme sur l’arrêt de cassation qui confirma les sanctions disciplinaires prises à leur encontre notamment pour manquement à l'honneur et à la probité   dans le cadre d’une garde à vue et ce sur le fondement de l’article 63-4 du code de procédure pénale qui interdit à l’avocat désigné par une personne gardée à vue de faire état à quiconque, pendant la durée de la garde à vue , les faits ayant fondé cette sanction ayant été révélés par des écoutes téléphoniques

Rapport du CNB sur le  rôle de l'avocat pendant garde à vue

Leur requête  fondée sur l’article 8 de la convention a été introduite le 1er aout 2011 et a été déclarée admissible 5 septembre 2013

Le mémoire d’admissibilité avec questions
adressé par la CEDH aux parties

La cour pose au gouvernement, aux requérants  ainsi qu’aux parties dont l’intervention sera autorisée les questions suivantes

Note de P MICHAUD la demande en intervention doit être autorisée par le president de la chambre , dont la décision est discrétionnaire..La demande du barreau de paris sera t elle acceptée alors que le recours vise sa décision disciplinaire ....???? et puis quelle sera sa réponse ??? 0 SUIVRE DONC

QUESTIONS POSEES PAR LA COUR AUX PARTIES

Y a-t-il eu violation de l’article 8 de la Convention dans le chef des requérants du fait de l’interception et de la retranscription de conversations entre eux et P.C., ainsi que de l’utilisation contre eux du procès-verbal de l’une de ces conversations à des fins disciplinaires ?

Les poursuites disciplinaires ayant été intentées sur la seule base de la transcription de la conversation téléphonique du 17 décembre 2002 entre P.C. et la requérante, y a-t-il lieu à cet égard de distinguer la situation de chacun des requérants ?

 analyse des faits par la cour ci dessous

 Dans le cadre d’une commission rogatoire délivrée le 2 décembre 2002 par le juge d’instruction, la ligne téléphonique de C.P. fut placée sous écoute. Des conversations téléphoniques entre lui et les requérants furent ainsi interceptées du 16 décembre 2002 au 28 janvier 2003 et retranscrites sur procès-verbal. Il en fut en particulier ainsi d’une conversation entre lui et la requérante du 17 décembre 2002. C.P. fut placé en garde à vue à cette dernière date. Il fut mis en examen le 18 décembre 2002.

Le 27 février 2003, le procureur général près la cour d’appel de Paris adressa une lettre au bâtonnier de l’ordre des avocats l’invitant à initier une procédure disciplinaire à l’encontre des requérants. Une copie des procès-verbaux retranscrivant les conversations téléphoniques susmentionnées était jointe à cette lettre. Selon le procureur général, il en résultait en particulier que, le 17 décembre 2002, la requérante avait commis une violation délibérée du secret professionnel en téléphonant à C.P. pour l’informer de l’état du dossier et de propos tenus par certains de ses collaborateurs en garde à vue qu’elle venait de rencontrer.

Le 21 mars 2003, le bâtonnier ouvrit une procédure disciplinaire à l’encontre de la requérante puis, le 20 mai 2003, à l’encontre du requérant.

Le 12 mai 2003, saisie par le juge d’instruction et C.P., la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris annula les transcriptions d’une conversation intervenue le 24 janvier 2003, au motif qu’elle se rapportait à l’exercice des droits de la défense du mis en examen et que son contenu comme sa nature n’étaient pas propres à faire présumer la participation de la requérante à une infraction. Elle refusa en revanche d’annuler les autres transcriptions, estimant que les propos tenus par les requérants étaient de nature à révéler de leur part une violation du secret professionnel et un outrage à magistrat. Par un arrêt du 1er octobre 2003, la chambre criminelle de la Cour de cassation rejeta le pourvoi formé par C.P. Elle retint en particulier que le principe de la confidentialité des conversations échangées entre une personne mise en examen et son avocat ne s’opposait pas à la transcription de certaines d’entre elles, dès lors qu’il était établi que leur contenu était de nature à faire présumer la participation de cet avocat à des faits constitutifs d’une infraction, fussent-ils étrangers à la saisine du juge d’instruction.

Le 16 décembre 2003, le conseil de l’ordre des avocats prononça contre le requérant la peine de l’interdiction temporaire d’exercer la profession d’avocat pendant deux ans, assortie d’un sursis de vingt-et-un mois, et, contre la requérante, la peine de l’interdiction temporaire d’exercer la profession d’avocat pendant un an, avec sursis. Le 12 mai 2004, la cour d’appel de Paris rejeta le recours de ces derniers contre cette décision. Elle souligna notamment que, dans sa décision du 12 mai 2003, revêtue de l’autorité de la chose jugée, la chambre de l’instruction avait conclu qu’il n’y avait pas lieu d’annuler les transcriptions en cause. Cependant, le 10 octobre 2008, la chambre criminelle de la Cour de cassation cassa et annula cet arrêt et renvoya cause et parties devant la cour d’appel de Paris autrement composée, considérant que la cour d’appel ne pouvait retenir que la décision du 12 mai 2003 était revêtue de l’autorité de la chose jugée alors que « les décisions des juridictions d’instruction, qui tranchent un incident de procédure, ne se prononcent pas sur l’action publique ».

La cour d’appel de Paris rejeta le recours des requérants par un arrêt du 24 septembre 2009.

Sur le fond, la cour d’appel de Paris constata qu’il ressortait de la transcription susmentionnée que la requérante avait rendu compte à C.P. des entretiens qu’elle avait eu avec des collaborateurs de ce dernier alors qu’ils étaient en garde à vue. Elle se référa aux propos suivants : « je vous téléphone, je viens d’aller voir Monsieur [C.] et Monsieur [V.] en garde à vue, pour vous informer un petit peu de ce qui s’est passé et des questions qui leur ont été posées » ; « ils les ont interrogés principalement sur l’origine des produits après l’embargo à savoir si eux-mêmes avaient eu connaissance ou vu de la viande de provenance anglaise postérieurement à l’embargo de 1996 » ; « ils essayaient surtout de connaître les relations qui existaient entre eux, le fonctionnement de Districoupe, les relations qu’il y avait entre Monsieur [C.] et Monsieur [B.] par rapport à son train de vie à lui » ; « ils supposent que Monsieur [B.] aurait touché des enveloppes de fournisseurs » ; « Monsieur [V.] me disait qu’ils l’avaient interrogé là-dessus ». La cour d’appel jugea qu’en agissant de la sorte alors que l’article 63-4 du code de procédure pénale interdit à l’avocat désigné par une personne gardée à vue de faire état à quiconque, pendant la durée de la garde à vue, de son entretien avec cette personne, la première requérante avait manqué à l’honneur et à la probité et avait commis une faute disciplinaire. Elle jugea qu’il en allait de même pour le requérant dès lors qu’il avait demandé à sa collaboratrice, alors avocate stagiaire, d’accomplir une telle démarche contraire à la loi.

Les requérants se pourvurent en cassation, invoquant notamment le principe de la confidentialité de la correspondance entre les avocats et leurs clients et l’article 8 de la Convention. Par un arrêt du 3 février 2011, la première chambre civile de la Cour de cassation déclara le pourvoi non admis.

L’article 100-5 a par la suite été complété par, notamment, la disposition suivante (loi no 2005-1549 du 12 décembre 2005) : « à peine de nullité, ne peuvent être transcrites les correspondances avec un avocat relevant de l’exercice des droits de la défense. »

 

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