Appréciation de la Cour
Appréciation de la Cour
– Considérations liminaires
63 La Commission reproche à la République française de faire obstacle à l’établissement, en vue de l’exercice de la profession de notaire, des ressortissants des autres États membres sur son territoire, en réservant l’accès à cette profession, en violation de l’article 43 CE, à ses propres ressortissants.
64 Le présent recours concerne donc uniquement la condition de nationalité requise par la réglementation française en cause pour l’accès à cette profession au regard de l’article 43 CE.
65 Il convient, par conséquent, de préciser que ledit recours ne porte ni sur le statut et l’organisation du notariat dans l’ordre juridique français ni sur les conditions d’accès, autres que celle afférente à la nationalité, à la profession de notaire dans cet État membre.
66 Au demeurant, il importe de souligner, ainsi que l’a indiqué la Commission lors de l’audience, que son recours ne concerne pas non plus l’application des dispositions du traité CE relatives à la libre prestation des services. De même, ledit recours ne concerne pas l’application des dispositions du traité concernant la libre circulation des travailleurs.
– Sur le manquement allégué
67 Il convient de rappeler d’emblée que l’article 43 CE constitue une des dispositions fondamentales du droit de l’Union (voir en ce sens, notamment, arrêt Reyners, précité, point 43).
68 La notion d’établissement au sens de cette disposition est une notion très large, impliquant la possibilité pour un ressortissant de l’Union de participer, de façon stable et continue, à la vie économique d’un État membre autre que son État membre d’origine, et d’en tirer profit, favorisant ainsi l’interpénétration économique et sociale à l’intérieur de l’Union européenne dans le domaine des activités non salariées (voir, notamment, arrêt du 22 décembre 2008, Commission/Autriche, C‑161/07, Rec. p. I‑10671, point 24).
69 La liberté d’établissement reconnue aux ressortissants d’un État membre sur le territoire d’un autre État membre comporte notamment l’accès aux activités non salariées et leur exercice dans les conditions définies par la législation de l’État membre d’établissement pour ses propres ressortissants (voir, notamment, arrêt du 28 janvier 1986, Commission/France, 270/83, Rec. p. 273, point 13, et, en ce sens, arrêt Commission/Autriche, précité, point 27). En d’autres termes, l’article 43 CE interdit à chaque État membre de prévoir dans sa législation, pour les personnes qui font usage de la liberté de s’y établir, des conditions d’exercice de leurs activités différentes de celles définies pour ses propres ressortissants (arrêt Commission/Autriche, précité, point 28).
70 L’article 43 CE vise ainsi à assurer le bénéfice du traitement national à tout ressortissant d’un État membre qui s’établit dans un autre État membre pour y exercer une activité non salariée et interdit toute discrimination fondée sur la nationalité résultant des législations nationales en tant que restriction à la liberté d’établissement (arrêt Commission/France, précité, point 14).
71 Or, en l’espèce, la législation nationale litigieuse réserve l’accès à la profession de notaire aux ressortissants français, consacrant ainsi une différence de traitement en raison de la nationalité prohibée, en principe, par l’article 43 CE.
72 La République française fait cependant valoir que les activités notariales sont soustraites du champ d’application de l’article 43 CE puisqu’elles participeraient à l’exercice de l’autorité publique au sens de l’article 45, premier alinéa, CE. Il convient donc, dans un premier temps, d’examiner la portée de la notion d’exercice de l’autorité publique au sens de cette dernière disposition et, dans un second temps, de vérifier si les activités confiées aux notaires dans l’ordre juridique français relèvent de cette notion.
73 S’agissant de la notion d’«exercice de l’autorité publique» au sens de l’article 45, premier alinéa, CE, il convient de souligner que l’appréciation de celle-ci doit tenir compte, selon une jurisprudence constante, du caractère propre au droit de l’Union des limites posées par cette disposition aux exceptions permises au principe de la liberté d’établissement, afin d’éviter que l’effet utile du traité en matière de liberté d’établissement ne soit déjoué par des dispositions unilatérales prises par les États membres (voir, en ce sens, arrêts Reyners, précité, point 50; Commission/Grèce, précité, point 8, et du 22 octobre 2009, Commission/Portugal, C-438/08, Rec. p. I-10219, point 35).
74 Il est également de jurisprudence constante que l’article 45, premier alinéa, CE constitue une dérogation à la règle fondamentale de la liberté d’établissement. Comme telle, cette dérogation doit recevoir une interprétation qui limite sa portée à ce qui est strictement nécessaire pour sauvegarder les intérêts que cette disposition permet aux États membres de protéger (arrêts Commission/Grèce, précité, point 7; Commission/Espagne, précité, point 34; du 30 mars 2006, Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti, C‑451/03, Rec. p. I‑2941, point 45; du 29 novembre 2007, Commission/Autriche, C‑393/05, Rec. p. I‑10195, point 35, et Commission/Allemagne, C‑404/05, Rec. p. I‑10239, points 37 et 46, ainsi que Commission/Portugal, précité, point 34).
75 En outre, la Cour a souligné itérativement que la dérogation prévue à l’article 45, premier alinéa, CE doit être restreinte aux seules activités qui, prises en elles-mêmes, constituent une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique (arrêts précités Reyners, point 45; Thijssen, point 8; Commission/Espagne, point 35; Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti, point 46; Commission/Allemagne, point 38, et Commission/Portugal, point 36).
76 À cet égard, la Cour a eu l’occasion de considérer que sont exclues de la dérogation prévue à l’article 45, premier alinéa, CE certaines activités auxiliaires ou préparatoires par rapport à l’exercice de l’autorité publique (voir, en ce sens, arrêts précités Thijssen, point 22; Commission/Espagne, point 38; Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti, point 47; Commission/Allemagne, point 38, et Commission/Portugal, point 36), ou certaines activités dont l’exercice, bien qu’il comporte des contacts, même réguliers et organiques, avec des autorités administratives ou judiciaires, voire un concours, même obligatoire, à leur fonctionnement, laisse intacts les pouvoirs d’appréciation et de décision desdites autorités (voir, en ce sens, arrêt Reyners, précité, points 51 et 53), ou encore certaines activités qui ne comportent pas d’exercice de pouvoirs décisionnels (voir, en ce sens, arrêts précités Thijssen, points 21 et 22; du 29 novembre 2007, Commission/Autriche, points 36 et 42; Commission/Allemagne, points 38 et 44, ainsi que Commission/Portugal, points 36 et 41), de pouvoirs de contrainte (voir en ce sens, notamment, arrêt Commission/Espagne, précité, point 37) ou de pouvoirs de coercition (voir, en ce sens, arrêts du 30 septembre 2003, Anker e.a., C‑47/02, Rec. p. I‑10447, point 61, ainsi que Commission/Portugal, précité, point 44).
77 Il convient de vérifier, à la lumière des considérations qui précèdent, si les activités confiées aux notaires dans l’ordre juridique français comportent une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique.
78 À cette fin, il y a lieu de prendre en considération la nature des activités exercées par les membres de la profession en cause (voir, en ce sens, arrêt Thijssen, précité, point 9).
79 La République française et la Commission s’accordent sur le fait que l’activité principale des notaires dans l’ordre juridique français consiste en l’établissement, avec les solennités requises, d’actes authentiques. Pour ce faire, le notaire devrait vérifier, notamment, que toutes les conditions légalement exigées pour la réalisation de l’acte sont réunies. L’acte authentique jouirait, en outre, d’une force probante et d’une force exécutoire.
80 Il convient de souligner, à cet égard, en premier lieu, que font l’objet d’une authentification, en vertu de la législation française, les actes ou les conventions auxquels les parties ont librement souscrit. En effet, celles-ci décident elles-mêmes, dans les limites posées par la loi, de la portée de leurs droits et obligations et choisissent librement les stipulations auxquelles elles veulent se soumettre lorsqu’elles présentent un acte ou une convention pour authentification au notaire. L’intervention de ce dernier suppose, ainsi, l’existence préalable d’un consentement ou d’un accord de volonté des parties.
81 En outre, le notaire ne peut modifier de façon unilatérale la convention qu’il est appelé à authentifier sans avoir recueilli au préalable le consentement des parties.
82 L’activité d’authentification confiée aux notaires ne comporte donc pas, en tant que telle, une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique au sens de l’article 45, premier alinéa, CE.
83 Le fait que certains actes ou certaines conventions doivent obligatoirement faire l’objet d’une authentification sous peine de nullité n’est pas susceptible de remettre en cause cette conclusion. En effet, il est courant que la validité d’actes divers soit soumise, dans les ordres juridiques nationaux et selon les modalités prévues, à des exigences de forme ou encore à des procédures obligatoires de validation. Cette circonstance ne saurait, dès lors, suffire à étayer la thèse défendue par la République française.
84 L’obligation des notaires de vérifier, avant de procéder à l’authentification d’un acte ou d’une convention, que toutes les conditions légalement exigées pour la réalisation de cet acte ou de cette convention sont réunies et, si tel n’est pas le cas, de refuser de procéder à cette authentification n’est pas non plus susceptible de remettre en cause la conclusion qui précède.
85 Certes, ainsi que le souligne la République française, le notaire exerce cette vérification en poursuivant un objectif d’intérêt général, à savoir garantir la légalité et la sécurité juridique des actes conclus entre particuliers. Toutefois, la seule poursuite de cet objectif ne saurait justifier que les prérogatives nécessaires à cette fin soient réservées aux seuls notaires ressortissants de l’État membre concerné.
86 Le fait d’agir en poursuivant un objectif d’intérêt général ne suffit pas, en soi, pour qu’une activité donnée soit considérée comme participant directement et spécifiquement à l’exercice de l’autorité publique. En effet, il est constant que les activités exercées dans le cadre de diverses professions réglementées impliquent fréquemment, dans les ordres juridiques nationaux, l’obligation pour les personnes qui les exercent de poursuivre un tel objectif, sans que ces activités relèvent pour autant de l’exercice de cette autorité.
87 Cependant, le fait que les activités notariales poursuivent des objectifs d’intérêt général, qui visent notamment à garantir la légalité et la sécurité juridique des actes conclus entre particuliers, constitue une raison impérieuse d’intérêt général qui permet de justifier d’éventuelles restrictions à l’article 43 CE découlant des spécificités propres à l’activité notariale, telles que l’encadrement dont les notaires font l’objet au travers des procédures de recrutement qui leur sont appliquées, la limitation de leur nombre et de leurs compétences territoriales ou encore leur régime de rémunération, d’indépendance, d’incompatibilités et d’inamovibilité, pour autant que ces restrictions permettent d’atteindre lesdits objectifs et sont nécessaires à cette fin.
88 Il est également vrai que le notaire doit refuser d’authentifier un acte ou une convention qui ne remplit pas les conditions légalement requises, cela indépendamment de la volonté des parties. Cependant, à la suite d’un tel refus, ces dernières restent libres soit de remédier à l’illégalité constatée, soit de modifier les stipulations de l’acte ou de la convention en cause, soit encore de renoncer à cet acte ou à cette convention.
89 En outre, la consultation et l’assistance juridiques assurées par le notaire lors de l’authentification desdits acte ou convention ne sauraient être considérées comme une participation à l’exercice de l’autorité publique, même lorsqu’il existe une obligation légale pour le notaire d’assurer une telle consultation ou assistance (voir, en ce sens, arrêt Reyners, précité, point 52).
90 S’agissant de la force probante et de la force exécutoire dont bénéficie l’acte notarié, il ne saurait être contesté que celles-ci confèrent auxdits actes d’importants effets juridiques. Cependant, le fait qu’une activité donnée comporte l’établissement d’actes dotés de tels effets ne saurait suffire pour que cette activité soit considérée comme participant directement et spécifiquement à l’exercice de l’autorité publique au sens de l’article 45, premier alinéa, CE.
91 En effet, en ce qui concerne, en particulier, la force probante dont jouit un acte notarié, il convient de préciser que celle-ci relève du régime des preuves consacré par la loi dans l’ordre juridique en cause. Ainsi, l’article 1319 du code civil, lequel détermine la force probante de l’acte authentique, fait partie du chapitre VI dudit code, intitulé «De la preuve des obligations et de celle du payement». La force probante conférée par la loi à un acte donné n’a donc pas d’incidence directe sur la question de savoir si l’activité comportant l’établissement de cet acte, prise en elle-même, constitue une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique, ainsi que l’exige la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêts précités Thijssen, point 8, et Commission/Espagne, point 35).
92 En outre, aux termes de l’article 1322 du code civil, «[l]’acte sous seing privé, reconnu par celui auquel on l’oppose, ou légalement tenu pour reconnu, a, entre ceux qui l’ont souscrit et entre leurs héritiers et ayants cause, la même foi que l’acte authentique».
93 S’agissant de la force exécutoire de l’acte authentique, il convient d’indiquer, ainsi que le fait valoir la République française, que celle-ci permet la mise à exécution de l’obligation que cet acte renferme, sans l’intervention préalable du juge.
94 La force exécutoire de l’acte authentique ne traduit cependant pas, dans le chef du notaire, des pouvoirs comportant une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique. En effet, si l’apposition par le notaire de la formule exécutoire sur l’acte authentique confère à ce dernier la force exécutoire, celle-ci repose sur la volonté des parties de passer un acte ou une convention, après vérification de leur conformité avec la loi par le notaire, et de leur conférer ladite force exécutoire.
95 Par conséquent, l’établissement d’actes authentiques dotés d’effets juridiques, tels que ceux décrits aux points 90 à 94 du présent arrêt, ne comporte pas une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique au sens de l’article 45, premier alinéa, CE.
96 S’agissant, en deuxième lieu, des missions de collecte d’impôts, dont est chargé le notaire, celles-ci ne sauraient être considérées en elles-mêmes comme constituant une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique. Il convient de préciser, à cet égard, que cette collecte est réalisée par le notaire pour le compte du débiteur, qu’elle est suivie d’une remise des sommes correspondantes au service compétent de l’État et que, ainsi, elle n’est pas fondamentalement différente de celle afférente à la taxe sur la valeur ajoutée.
97 S’agissant, en troisième lieu, des actes, tels que les libéralités-partages, les contrats de mariage, les constitutions d’hypothèques, les ventes en état futur d’achèvement et les baux ruraux cessibles, qui doivent être conclus par acte notarié sous peine de nullité, il est renvoyé aux considérations figurant aux points 80 à 95 du présent arrêt.
98 En ce qui concerne, en quatrième lieu, le statut spécifique des notaires dans l’ordre juridique français, il suffit de rappeler, ainsi qu’il ressort des points 75 et 78 du présent arrêt, que c’est au regard de la nature des activités en cause, prises en elles-mêmes, et non pas au regard de ce statut en tant que tel, qu’il convient de vérifier si ces activités relèvent de la dérogation prévue à l’article 45, premier alinéa, CE.
99 Deux précisions s’imposent néanmoins à cet égard. Premièrement, il est constant que, en dehors des cas où la désignation d’un notaire est prévue par voie de justice, chaque partie a le libre choix d’un notaire, conformément à l’article 4 du règlement national des notaires mentionné au point 8 du présent arrêt. S’il est vrai qu’une partie des honoraires des notaires est fixée par la loi, il n’en reste pas moins que la qualité des services fournis peut varier d’un notaire à l’autre en fonction, notamment, des aptitudes professionnelles des personnes concernées. Il s’ensuit que, dans les limites de leurs compétences territoriales respectives, les notaires exercent leur profession, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 18 de ses conclusions, dans des conditions de concurrence, ce qui n’est pas caractéristique de l’exercice de l’autorité publique.
100 Il y a lieu de relever, deuxièmement, ainsi que le fait valoir la Commission sans être contredite sur ce point par la République française, que les notaires sont directement et personnellement responsables, à l’égard de leurs clients, des dommages résultant de toute faute commise dans l’exercice de leurs activités.
101 Au demeurant, l’argument que tire la République française de certains actes de l’Union n’emporte pas davantage la conviction. S’agissant des actes mentionnés au point 46 du présent arrêt, il convient de préciser que le fait que le législateur ait choisi d’exclure les activités notariales du champ d’application d’un acte donné ne signifie pas que ces dernières relèvent nécessairement de la dérogation prévue à l’article 45, premier alinéa, CE. S’agissant, en particulier, de la directive 2005/36, il ressort du libellé même du quarante et unième considérant de cette directive, selon lequel celle-ci «ne préjuge pas l’application [...] de l’article 45 [CE], notamment en ce qui concerne les notaires», que le législateur de l’Union n’a précisément pas pris position sur l’applicabilité de l’article 45, premier alinéa, CE à la profession de notaire.
102 L’argumentation fondée sur les actes de l’Union visés aux points 47 et 48 du présent arrêt n’est pas pertinente non plus. S’agissant des règlements mentionnés au point 47 de cet arrêt, ceux-ci portent sur la reconnaissance et l’exécution d’actes authentiques reçus et exécutoires dans un État membre et n’affectent pas, par conséquent, l’interprétation de l’article 45, premier alinéa, CE. La même conclusion s’impose au regard des actes de l’Union mentionnés au point 48 dudit arrêt dans la mesure où ils se limitent, ainsi que le fait valoir à juste titre la Commission, à confier aux notaires, ainsi qu’à d’autres autorités compétentes désignées par l’État, la tâche de certifier l’accomplissement de certains actes et formalités préalables au transfert du siège, à la constitution et à la fusion de sociétés.
103 S’agissant des résolutions de 1994 et de 2006, mentionnées au point 49 du présent arrêt, force est de souligner que celles-ci sont dépourvues d’effets juridiques, étant donné que de telles résolutions ne constituent pas, par nature, des actes contraignants. Au demeurant, bien qu’elles indiquent que la profession de notaire relève de l’article 45 CE, le Parlement a explicitement exprimé son souhait, dans la première de ces résolutions, que des mesures soient prises pour que la condition de nationalité pour l’accès à la profession de notaire soit supprimée, cette position étant de nouveau implicitement confirmée dans la résolution de 2006.
104 En ce qui concerne l’argument que tire la République française de l’arrêt Colegio de Oficiales de la Marina Mercante Española, précité, il convient de préciser que l’affaire à l’origine de cet arrêt portait sur l’interprétation de l’article 39, paragraphe 4, CE, et non pas sur celle de l’article 45, premier alinéa, CE. En outre, il ressort du point 42 dudit arrêt que, lorsqu’elle a jugé que les fonctions confiées aux capitaines et aux seconds de navires constituent une participation à l’exercice de prérogatives de puissance publique, la Cour visait l’ensemble des fonctions exercées par ceux-ci. La Cour n’a donc pas examiné l’unique attribution en matière notariale confiée aux capitaines et aux seconds de navires, à savoir la réception, la garde et la remise de testaments, séparément de leurs autres compétences, telles que, notamment, les pouvoirs de coercition ou de sanction dont ils sont investis.
105 Quant à l’arrêt Unibank, précité, auquel se réfère également la République française, force est de constater que l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt ne portait aucunement sur l’interprétation de l’article 45, premier alinéa, CE. En outre, la Cour a jugé, au point 15 dudit arrêt, que, pour qu’un acte soit qualifié d’acte authentique au sens de l’article 50 de la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 1972, L 299, p. 32), est nécessaire l’intervention soit d’une autorité publique, soit de toute autre autorité habilitée par l’État d’origine.
106 Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que les activités notariales, telles qu’elles sont définies en l’état actuel de l’ordre juridique français, ne participent pas à l’exercice de l’autorité publique au sens de l’article 45, premier alinéa, CE.
107 Il convient par conséquent de constater que la condition de nationalité requise par la réglementation française pour l’accès à la profession de notaire constitue une discrimination fondée sur la nationalité interdite par l’article 43 CE.
108 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de considérer le recours de la Commission comme fondé.
109 Par conséquent, il convient de constater que, en imposant une condition de nationalité pour l’accès à la profession de notaire, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 43 CE
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